José Giovanni > Réalisateur scénariste télévision > L'alibi |
Extrait de Mes grandes gueules, José Giovanni, 2002
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Un producteur de télévision allemand me propose le pilote d'une série policière, et d'autres épisodes si l'ambiance me plaît. Création libre, et les cadres de mon équipe française si je veux. J'ai dans mes cartons une histoire sur un alibi très ingénieux. Je vais aux studios de la Bavaria à Munich. Le producteur, Ringelmann, accepte le sujet et me présente l'acteur qui jouera le commissaire, Lovitz. La série s'intitulera « Le Vieux ». Mon équipe et moi serons logés au bord de lac de Steinberg, à deux pas du château baroque de ce cinglé de Louis Il de Bavière. C'est d'une étrange beauté quand l'édifice émerge du brouillard. Pendant le tournage de «L'alibi », je jette les bases d'autres histoires. Je pourrai les tourner à ma convenance entre deux romans ou deux longs-métrages. À cette cadence infernale, la vie m'échappera à ne même plus m'apercevoir qu'elle existe. Le producteur ne sait comment nous faire plaisir. L'équipe française a un régime alimentaire mieux adapté à ses goûts. Ma partie du studio est voisine du film géant de Bergman L'uf du serpent. Il doit en avoir marre de refiler 80 % de ses gains au fisc suédois. Dans le système allemand, le créateur, qui fait fonctionner le studio, avec toute une équipe, ne paye que 12 % d'impôts sur place. La guest star de mon film s'appelle Michel Robin. Il joue un type accusé d'avoir tué sa femme pour épouser une pin-up étrangère menacée d'expulsion. Mais où est le corps ? L'alibi de l'accusé est en bronze. Michel Robin les épate à force de talent. Je tourne en français. On doublera en allemand. Impression étrange. Ma monteuse, Jacqueline Thiédot, trouve que, « de toutes les manières, c'est bizarre d' entendre des Allemands parler un français qu'ils ont appris sous l'Occupation »... |
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